Actualités 30.08.2016

La France dit non au TAFTA mais oui au CETA : le double discours du gouvernement

« Les Américains ne donnent rien ou alors des miettes (…). Il faut un coup d’arrêt clair et définitif à ces négociations pour repartir sur de bonnes bases », a déclaré aujourd’hui Matthias Fekl, Secrétaire d’Etat au commerce extérieur à propos des négociations sur le traité de libre-échange TAFTA (Etats-Unis/Union européenne). Cette déclaration intervient deux jours après que le vice-chancelier allemand Sigmar Gabriel ait constaté lui aussi l’échec des négociations du TAFTA. Pas un mot, en revanche, sur l’accord entre le Canada et l’UE, qui présente pourtant les mêmes dangers. Or le CETA pourrait entrer en vigueur en force dès l’automne prochain.

Près de 100.000 personnes ont signé ces dernières semaines une pétition demandant à François Hollande de dire non au TAFTA et au CETA. foodwatch se réjouit que la mobilisation citoyenne porte ses fruits mais il faut rappeller que le CETA, cousin canadien du traité Europe-Etats-Unis TAFTA, présente exactement les mêmes dangers : déni de démocratie, remise en cause des normes existantes, promesse d’un nivellement par le bas, justice d’exception pour les multinationales…

François Hollande et Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale, ont confirmé cette position mais se sont abstenus eux aussi de mentionner le CETA. Il faut s’en inquiéter car le texte d’accord entre l’UE et le Canada est déjà finalisé et pourrait passer en force dès l’automne, avant toute consultation des députés en France. Les ministres des Vingt-Huit devraient en effet adopter le CETA et valider son application provisoire lors d’un vote en octobre 2016.

Certaines dispositions du CETA, que l’on retrouve dans les négociations du TAFTA, auront un impact durable, limitant considérablement la capacité des parlementaires, nationaux et européens, à légiférer pour décider démocratiquement de nos règles et normes sociales, environnementales et économiques. Une entrée en vigueur avant que l’Assemblée nationale et le Sénat se prononcent serait tout simplement inacceptable.

Le gouvernement tient un double discours en affirmant que le CETA est l’anti-TAFTA. Mais l’accord avec le Canada ne garantit pas le principe de précaution, comme l’a démontré foodwatch dans une analyse juridique fouillée. Ce principe, qui protège les citoyens, est une pierre angulaire de la politique européenne en matière de santé et de sécurité alimentaire. L’adoption du règlement européen REACH, l’un des plus exigeants au monde en matière de produits chimiques, serait par exemple quasiment impossible avec le CETA.

Enfin, la question de la constitutionnalité du CETA se pose. En Allemagne, plus de 125.000 citoyens ont déposé une plainte cette semaine, avec foodwatch et deux autres organisations. Car il s’avère que le CETA viole quatre principes fondamentaux de la Constitution allemande. C’est la plus importante plainte jamais déposée devant la Cour constitutionnelle fédérale.

Matthias Fekl prend acte qu’il n’y a plus en France de soutien politique au traité entre les Etats-Unis et l’Union européenne. Pour foodwatch et nombre d’organisations de la société civile à l’initiative de pétitions ciblant le gouvernement, il n’y a pas plus de soutien au CETA qu’au TAFTA.