Perrier en sursis : Nestlé mise en demeure devra quand même faire face à la justice, réagit Foodwatch
Dernier rebondissement en date dans l’affaire des eaux filtrées illégalement : le préfet du Gard a mis en demeure aujourd’hui la société Nestlé Waters Supply Sud de retirer dans un délai de deux mois les filtres illégaux d’un diamètre de 0,2 µm sur le site de production Perrier. Dans un communiqué, la préfecture du Gard précise qu’elle se prononcera d’ici le 7 août prochain sur la demande de renouvellement de l’autorisation d’exploitation des forages destinés à la fabrication d’eau minérale naturelle sur le site de Vergèze.
Foodwatch, qui a porté plainte avec constitution de partie civile contre Nestlé Waters, estime que cette décision va dans le bon sens. Mais Foodwatch souligne qu’il a malheureusement fallu le travail sans relâche de journalistes d’investigations du Monde, de France Info, de Mediapart, mais aussi de l’Agence régionale de santé d’Occitanie et des hydrogéologues mandatés par la préfecture du Gard pour en arriver à cette décision. Sans cela, on a l’impression que Nestlé Waters aurait poursuivi son business comme si de rien n’était.
Pour Ingrid Kragl, directrice de l’information et des enquêtes chez Foodwatch : « Cette décision du Préfet concernant Perrier n’enlève rien à la gravité des infractions caractérisées qui figurent dans notre plainte. Ce sursis n’équivaut pas à un blanc-seing donné à Nestlé pour continuer de faire n’importe quoi au mépris des réglementations et des consommateurs. Nestlé devra quand même faire face à la justice. Car cela fait des années que la multinationale commercialise des produits frauduleux en France et dans le monde. Une information judiciaire est désormais ouverte au tribunal de Paris. La procédure pénale doit maintenant suivre son cours et l’enquête menée par les juges doit faire toute la lumière sur les agissements commis par la multinationale et ses responsables. Nous serons attentifs à ce que la santé et les consommateurs ne soient pas laissés de côté. ».
On a appris il y a quelques semaines que des bactéries pathogènes de l'intestin (entérobactéries) avaient été retrouvées dans l'eau de bouteilles de Perrier, au sein de l'usine de Vergèze (Gard) où est produite la célèbre marque. Un rapport d'hydrogéologues, commandé par la préfecture du Gard, a rendu un avis défavorable à la poursuite de l'exploitation de la source de Vergèze sous la dénomination « eau minérale naturelle ». D’après l’Agence régionale de santé de l’Occitanie, « une destruction complète pourrait être envisagée ». La ligne de production a été bloquée et des centaines de milliers de bouteilles immobilisées.
Ce n’est pas la première fois que les autorités sanitaires épinglent Perrier. En avril 2024 déjà, près de 3 millions de bouteilles de Perrier avaient dû être détruites qui faisaient « courir un risque pour la santé des consommateurs » selon le préfet du Gard, suite à un épisode de contamination d'origine fécale (coliformes, Escherichia coli). Sans l’intervention des autorités, ces bouteilles de Perrier auraient-elles été commercialisées comme si de rien n’était ?
Pour Foodwatch, même si Nestlé s’attèle à minimiser en affirmant que « tous les produits mis sur le marché sont sûrs », la confiance est rompue. Lors du dernier épisode concernant Perrier, par exemple, l'entreprise n'a pas, comme le code de la santé publique le lui impose, prévenu immédiatement les autorités sanitaires de la contamination et aurait attendu 10 jours pour avertir l’Agence régionale de santé d’Occitanie. Nestlé n’a fait aucun cas des consommateurs laissés dans le flou total. Nestlé a eu recours à des procédés interdits par la réglementation européenne sur ses eaux pendant des années pour continuer d’écouler ses produits en catimini et engranger des milliards de profits indus. Selon Mediapart, des milliards de bouteilles d'eau Nestlé ont été illégalement traitées pendant au moins 15 ans.
Concernant la menace pour les emplois qu’aurait représenté une fermeture de l’usine produisant Perrier, Foodwatch considère, tout comme elle l’a souligné avec le précédent scandale Buitoni/Nestlé, qu’il est regrettable que les employés aient à payer le prix d’une mauvaise gestion des risques par la multinationale qui savait très bien ce qu’elle faisait. Aucune multinationale n’est au-dessus des lois, souligne Foodwatch. Foodwatch est confiante qu’un procès établira les responsabilités et que des sanctions exemplaires seront prononcées afin de casser le climat d’impunité.
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