Actualités 17.04.2020

Pesticides : le coronavirus n’arrête pas Bayer-Monsanto, BASF et Syngenta

Alors que le monde entier a les yeux rivés sur la crise du Covid-19, les puissants fabricants de pesticides européens - Bayer-Monsanto, BASF et Syngenta - font actuellement tout ce qui est en leur pouvoir pour bloquer toutes règles plus strictes sur les pesticides. En particulier, ils défendent ardemment leur autorisation à fabriquer et exporter vers d’autres continents des substances interdites en Europe au mépris de la santé, de l'environnement et des droits humains. Pourtant bannis dans l’Union, ces pesticides utilisés ailleurs finissent par revenir par effet boomerang dans nos assiettes via les importations de produits alimentaires. foodwatch France, Allemagne et Pays-Bas lancent aujourd’hui une pétition pour mettre fin à cette pratique.

Un business toxique

Le constat est simple et sans appel : Bayer-Monsanto, BASF et Syngenta continuent de produire des pesticides pourtant bannis de l’Union européenne à cause de leur toxicité pour l’environnement et la santé. Ils vendent ces produits dangereux à travers la planète dans les pays où la règlementation protège moins bien l’environnement et les populations. Cette pratique en dit long sur les industriels des pesticides qui profitent des règles moins strictes de certains pays d’Afrique ou d’Amérique du sud pour continuer à vendre leurs substances les plus toxiques, une grave violation des droits de l'homme pointée du doigt par les Nations unies.

Un effet boomerang tout aussi toxique

Le problème est donc très grave, d’autant que les résidus de ces pesticides bannis finissent par revenir dans nos assiettes via nos importations de fruits, de légumes, de riz, etc. Pour preuve, ces dernières semaines, nous n’avons pas eu de mal à repérer des produits notamment destinés au marché français contenant des taux inquiétants de substances interdites en Europe mais pourtant tout prêts à être vendus chez nous. Nous avons par exemple mis la main sur du thé vert à l’anthraquinone (un répulsif pour oiseaux, interdit depuis 2010), des poires au chlorpyrifos (un pesticide très toxique pour le cerveau en développement, interdit depuis janvier 2020) ou encore des poivrons au tricyclazole (un perturbateur endocrinien avéré, interdit).

Un lobbying sans état d’âme   

La partie se joue donc surtout au niveau européen, avec le renforcement des règles qui se profilait en ce début d’année 2020. Mais toutes les tentatives de la Commission pour faire appliquer des règles plus strictes sur les résidus de pesticides dans les produits importés ont échoué jusqu'à présent. En cause : la pression écrasante des lobbies de Bayer-Monsanto & Co., comme l’a démontré l’ONG Corporate Europe Observatory dans un récent rapport. 
En plein pic de coronavirus, le 16 mars dernier, les lobbies continuaient leur travail de sape. Pour preuve, foodwatch a mis la main sur un document compromettant adressé à la Commission européenne mi-mars dernier. Bayer y fait pression à deux reprises pour réclamer le statu quo sur les pesticides afin d’avoir la voie libre pour leur juteux business, notamment en Afrique ou en Amérique du sud. 
Le jeu sournois et sans état d’âme de Bayer-Monsanto, BASF et Syngenta est scandaleux . Ils portent une lourde responsabilité dans l’impact humain et environnemental désastreux de leur business toxique à travers la planète.

En France, une interdiction prévue pour 2022 

La société civile a dû batailler pour faire adopter en 2018 dans une loi : la production, le stockage et l’exportation des pesticides seront interdits dès janvier 2022 sur le territoire français. 
Mais bien sûr les lobbies cherchent à bloquer cette loi qui ne les arrange pas : L’Union des industriels de la protection des plantes (UIPP) – au fait, on ne dit pas pesticides, on dit protection des plantes chez les lobbies - a même prétendu avec l'Union française des semenciers que cette loi serait contraire à la « liberté d'entreprendre ». France Nature Environnement était alors montée au créneau pour défendre la légitimité de cette mesure et le Conseil constitutionnel français  a finalement décidé le 31 janvier 2020 que cette interdiction était tout à fait valide.  
La réaction dans les médias de l’UIPP en dit long sur leurs intentions : ses membres sont en train d’« étudier les voies juridiques possibles ». Autrement dit, peu importe la protection de la santé des populations et de l’environnement, les lobbies des pesticides sont déterminés à éviter coûte que coûte toute nouvelle règlementation contraignante afin de maintenir leurs profits. 
Or c’est exactement le contraire que nous allons défendre, tous ensemble : il faut que cette loi française soit étendue à toute l'Europe.  

foodwatch exige la fin de la production et de l’exportation 

Ce dont nous avons fondamentalement besoin pour protéger les droits de l'homme, l'environnement et le droit à une alimentation saine, c'est d'une interdiction totale de la production, du stockage et de la vente de pesticides contenant des substances interdites par l'UE, et d'une interdiction totale des importations de produits alimentaires contenant de telles substances.

Signez et partagez la pétition !

Mise à jour du 20 avril 2020

Dans une version antérieure de cette page, nous avons mentionné que 200 000 décès par intoxication aiguë dus à des pesticides étaient estimés par an. Ce chiffre, bien qu’utilisé entre autres dans un document officiel des Nations unies de 2017, est contesté car il se base à l’origine sur une étude qui date des années 80 et il n’existe pas de chiffres récents sur ce sujet. Bayer, BASF et d’autres détracteurs cherchent à alimenter les controverses sur ce chiffre pour faire diversion. Nous voulons écarter tout prétexte que ces entreprises pourraient utiliser pour détourner l'attention du vrai problème : leurs responsabilités dans les dégâts considérables pour la santé et l'environnement causés par l’usage de leurs pesticides, qui sont pourtant interdits dans l'UE en raison de leur dangerosité. C'est pourquoi foodwatch a décidé de clarifier et de supprimer ici le chiffre de 200 000 décès par intoxication aiguë dus à des pesticides estimés par an. Les données actuelles sont insuffisantes et les chiffres varient. Mais le fait que les pesticides dangereux causent des dommages importants est incontestable. Aussi il est inacceptable que les entreprises ciblées restent silencieuses sur leurs responsabilités. Il est grand temps qu’elles assument, en arrêtant la production et l'exportation de pesticides dangereux - interdits dans l'UE - vers d’autres continents. 

Pour aller plus loin, consultez notre rapport international !

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