Communiqués de presse 23.09.2021

Conflits d’intérêts et présidence française de l’UE : non aux « cadeaux » d’entreprises

Alors que le secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes, Clément Beaune, est auditionné aujourd’hui à l’Assemblée nationale sur la préparation de la présidence française de l’UE en 2022, foodwatch, Corporate Europe Observatory et l’Observatoire des multinationales lancent une pétition demandant à Emmanuel Macron, président de la République française, Clément Beaune et Xavier Lapeyre de Cabanes, secrétaire général de la présidence française, de refuser tout parrainage de grandes entreprises pendant la présidence française du Conseil de l’Union européenne, de janvier à juin 2022. Les trois organisations de la société civile estiment qu'il est inacceptable qu'un gouvernement, à la tête de l'une des institutions-clés de l'UE disposant d'énormes pouvoirs législatifs et politiques, puisse laisser des entreprises privées devenir ‘partenaires’ par le biais de parrainages financiers ou en nature. Ce sponsoring, qui permet aux entreprises de promouvoir leurs marques et leurs produits sur le site web de la présidence tournante de l’UE ou auprès des décideurs européens, comporte des risques de conflits d'intérêts avec l’agenda politique européen inadmissibles. En 2020, l’Allemagne avait, elle, décidé de se passer de tout partenaire privé. 

Les grandes entreprises parrainent la présidence du Conseil de l'UE depuis des années. Par exemple, les sponsors de la présidence autrichienne (2018) comprenaient Audi et Microsoft ; la présidence croate (2020) a choisi INA, une compagnie pétrolière et les producteurs automobiles Peugeot et Citroën. Coca-Cola a soutenu la présidence roumaine en 2019 en tant que « partenaire premium », sa marque et ses produits étant très visibles lors des réunions de ministres. 

Pour Suzy Sumner de foodwatch international : « Il n'y a aucune excuse pour que les gouvernements acceptent les faveurs des entreprises. Si la France a besoin de nourriture, de boissons, de transports ou de tout autre type de biens ou de services pendant sa présidence de l'UE, elle doit simplement se les procurer par les moyens habituels et en payer le prix juste. Ces accords de parrainage douteux doivent cesser ». 

La présidence du Conseil de l'Union européenne ‘tourne’ tous les six mois entre les 27 États membres de l'UE. Le 1er janvier 2022, ce sera donc au tour de la France. Les eurodéputé.es La République en Marche (du groupe Renew au Parlement européen) ont déjà mis en garde Paris contre le recours au mécénat d'entreprises pendant la présidence française. Les parlementaires européens ont déclaré que la présidence française de 2022 devrait être « attentive à la perception du public » et qu'elle « ne devrait pas recourir » aux parrainages privés.

Suite à l'implication de Coca-Cola dans la présidence roumaine en 2019, foodwatch avait porté plainte auprès de la médiatrice européenne Emily O'Reilly. Dans une décision publiée en juin 2020, Emily O’Reilly soulignait que ces accords avec des entreprises constituaient bien un « risque réputationnel » pour l'Union européenne et que des lignes directrices devaient être mises en place. Malheureusement, les lignes directrices décidées ensuite au sein du Conseil sont insuffisantes et n’interdisent pas aux Etats membres de recourir aux partenariats avec le secteur privé.

Le gouvernement français refusera-t-il, comme l’Allemagne l’a fait en 2020, tout sponsor privé ? Pour foodwatch, Corporate Europe Observatory et l’Observatoire des multinationales, le président Emmanuel Macron doit dire non à tout accord de parrainage – financier ou en nature - pour la présidence du Conseil. Dans un contexte de défiance grandissante à l’égard des responsables et institutions politiques, la France doit être exemplaire et envoyer un message fort aux citoyen.nes et aux autres Etats membres en refusant ces accords douteux qui n'ont pas leur place dans le fonctionnement de notre démocratie. 

Tweets d'un journaliste allemand de ZDF avec des photos montrant le parrainage de la présidence roumaine par Coca-Cola.

Sources :

  • Pétition - Conflits d’intérêt et présidence française de l’UE : non aux « cadeaux » des entreprises ! Une pétition de foodwatch international en collaboration avec foodwatch Allemagne, foodwatch Pays-Bas et foodwatch Autriche
  • Décision du Médiateur européen dans l’affaire 1069/2019/MIG concernant le parrainage commercial des présidences du Conseil de l’Union européenne
  • Engagement de l’Allemagne de ne pas recourir au sponsoring privé (2020)
  • La délégation Renaissance au Parlement européen - un groupe de 23 députés européens principalement français au sein du groupe Renew - a mis en garde Paris contre le recours au mécénat d'entreprise lors de la prochaine présidence française du Conseil de l'UE - in Politico (14/05/2021) 
  • Lettre envoyée à Emmanuel Macron par foodwatch (22/09/2021)


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